D’où vient ce besoin de ne chercher le
vrai qu’au niveau de l’anecdote et par le faux du pittoresque ? Certes,
nous le savons, chacun de nous est menacé par son Golem, grossière image
d’argile, notre double d’erreur, la dérisoire idole qui nous rend visibles et
contre laquelle, vivants, il nous est donné de protester par la discrétion de
notre vie ; mais voici que, morts, elle nous perpétue : comment
l’empêcher de faire de notre disparition, fût-elle la plus silencieuse, le
moment où, condamnés à apparaître, nous devons répondre précipitamment à l’interrogatoire
public en avouant ce que nous ne fûmes pas ? Et quelquefois ce sont nos
plus proches amis, dans la bonne intention de parler à notre place et pour ne
pas nous abandonner trop vite à notre absence, qui contribuent à ce
travestissement bienveillant ou malveillant sous lequel on nous verra
désormais. Non, il n’y a pas d’issue pour les morts, pour ceux qui meurent
après avoir écrit et je n’ai jamais distingué dans la postérité la plus
glorieuse qu’un enfer prétentieux où les critiques, nous tous, faisons figure
d’assez tristes diables.

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