Antiphysique

 

Source : Les nouveaux visages de la possession démoniaque par Marie Renaud-Trémelot, édition du Cerf, préface de Marie-Hélène Brousse, postface de Jacques Arènes.

Ce que recouvre la notion de jouissance de l’Autre se répartit en « trois catégories », selon l’acception grammaticale du « de. » Si c’est un génitif objectif, il s’agit de la jouissance du corps de l’Autre, de prendre le corps de l’Autre comme objet, jouissance dont l’impossibilité fait l’absence du rapport sexuel. C’est donc une jouissance corrélée à l’imaginaire. Si le « de » est un ablatif, la jouissance du sujet psychotique est liée au support d’un objet, à la non-soustraction de l’objet. Elle se produit par l’invasion et n’est pas limitée par la fonction phallique, car cette dernière est forclose dans la psychose. Cette jouissance de l’Autre met le sujet en rapport avec un Autre compact et intrusif. Le monde est vécu comme persécutant et inquiétant.

Une élaboration signifiante et une élaboration de sens peuvent permettre d’en assurer le traitement. Le signifiant et le sens ont une prise sur cette jouissance. Enfin, si c’est un génitif subjectif, c’est ce que Lacan désigne par Autre Jouissance, c’est-à-dire phallique. C’est une jouissance supplémentaire propre à la position féminine, qui s’éprouve, qui ne peut se symboliser, au bord du langage et qui est donc corrélé au réel. La jouissance à laquelle le sujet à affaire se fait par soustraction de la fonction phallique mais demeure limitée par cette fonction. C’est une jouissance qui est sans objet. Le signifiant et le sens n’ont pas de prise dessus.

L’altérité de cette jouissance demeure strictement radicale et on ne peut rien en dire. C’est pourquoi Lacan précise que, pour lui, « il est clair que le témoignage essentiel des mystiques, c’est justement qu’ils l’éprouvent, mais qu’ils n’en savent rien. » Pour résumer, la jouissance radicalement Autre s’articule non pas au mode d’assujettissement du sujet à la structure psychique mais à sa sexuation.

Autrement dit, la jouissance à laquelle le sujet psychotique a affaire est énigmatique, et donc, se décrypte, se déchiffre. C’est tout le sens du travail avec le sujet psychotique : à l’inverse, la jouissance radicalement Autre est un mystère.

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