Unsterblich

 

Je me trouvais dans une ville méridionale, une rue montant avec un escalier à paliers, étroite. Il était midi : soleil radieux. Un vieux douanier autrichien, ou un personnage de ce genre, passe à côté de moi, plongé dans ses réflexions. Quelqu’un dit : « C’est un homme qui ne peut pas mourir. Il est certes mort il y a quarante ou cinquante ans, mais il n’a pas pu se décomposer. » Je suis très étonné. Apparaît alors un personnage étrange, un chevalier de stature imposante, armé d’une cuirasse jaunâtre. Il a l’air fort et impénétrable et rien n’a de prise sur lui. Il porte sur le dos une croix de Malte rouge. Il continue d’exister depuis le douzième siècle et prend tous les jours le même chemin entre midi et une heure. Personne ne s’étonne de ces deux personnages, mais, pour ma part, je m’en étonnai énormément. Je passe sous silence mes talents d’interprétation. Le vieil Autrichien me fait penser à Freud, le chevalier à moi-même. Une voix intérieure dit : « Tout est vide et dégoût. » Il me faut le supporter.

Theodor Baierl : Le Chevalier et la Mort, 1918
Ulrich Hoerni : Préface au Livre rouge de C.G. Jung

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