Nous ignorons à peu près tout de l’inconscient des individus, pour autant qu'il existe ; en revanche, nous connaissons assez bien leur conscience politique — de « pólis », la cité —, qui s’exprime, entre autres, par la manière dont ils votent, dont ils parlent, dont ils font la cuisine, etc., par des faits observables.
Les individus forment des peuples et des nations, en
fonction de leur race, de leur ethnie, de leur langue, de leur foi et c’est
seulement à partir de là que l’on peut tenter de se représenter un inconscient
collectif. S’il existe un inconscient collectif, alors, chaque peuple doit
posséder le sien et selon toute logique, il dépend étroitement de la conscience
que tout individu se fait de lui et de son histoire collective, pas seulement familiale.
D’autre part, s’il existe des archétypes communs, la sociologie dans laquelle
ils apparaissent diffère de l’une à l’autre, et donc, ces archétypes ne peuvent
valoir que particulièrement, par rapport à un ensemble de coordonnées
spatio-temporelles.
Le problème de Jung et des psychanalystes en général
est qu’ils rabattent tout à des problèmes personnels, sur des schémas
immuables, alors qu’un trouble psychique déborde toujours l’individu et s’inscrit
dans un tissu d’interactions historiques, économiques, politiques, etc. Le
psychisme d’un Flamand n’est pas le psychisme d’un Wallon n’est pas le
psychisme d’un Suisse, etc. D’où l’intuition géniale de Deleuze : « Tout
délire est racial mais pas forcément raciste. » L’ethnopsychiatrie
présente une approche à la fois plus holiste et plus identitaire, mais
curieusement elle s’intéresse surtout aux populations extra-européennes.
Cela a-t-il un sens de faire la psychanalyse d’un peuple étranger ? Peut-être si l’on considère que seul un point de vue extérieur aperçoit ce que nous ne pouvons pas observer de nous-mêmes. Mais qui pourrait se charger de cette tâche sans s’exposer aux soupçons de racisme ou de biais cognitifs ? Et selon quels critères de guérison ?

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