« Pas de panique, je suis gnostique »

 

Source : Jung entre l’Orient et l’Occident par Vladeta Jerotić, éditions de L’Äge d’homme, collection perspectives spirituelles.

Selon Hans Trüb, Jung déplace la « vraie » vie humaine dans la totalité autonome de l’âme qui est promue comme las seule réalité à laquelle il faut tendre, réduisant la vie sociale et interhumaine à l’effort d’adaptation du Moi. Cette attitude spirituelle de Carl Gustav Jung tire ses origines du gnosticisme, notamment de l’interprétation gnostique du « Royaume céleste » dans le Nouveau Testament. Alors que la traduction littérale de ce passage du Nouveau Testament est : « Le Royaume céleste est entre vous » dans la libre traduction gnostique figure : « Le Royaume céleste est en vous. »

Dévalorisant le monde dans sa socialité et la rencontre entre les humains, ramenant la vie sociale à une simple « adaptation », Jung croit dégager la vie intérieure de l’homme en l’enfermant dans une sphère à part et espère pouvoir réaliser ses expériences thérapeutiques sans nuire aux rapports de l’homme avec le monde. Contrairement aux personnalités, mais aussi aux existentialistes et les Dasein analystes qui considèrent que le soi humain est par essence pris dans une relation à l’autre et tourné vers le dialogue comme rencontre de l’homme avec l’homme et de l’homme avec le monde, Jung considère que l’homme peut se réaliser dans la solitude de son Soi, grâce à un processus de connaissance qui plonge dans les profondeurs de son être.

Selon Hans Trüb, le vrai Soi vivant ne peut se réaliser dans sa dimension métaphysique profonde qu’à travers la rencontre : la rencontre de l’homme avec Dieu, de l’homme avec l’homme et de l’homme avec le monde concret. Par le déplacement de la rencontre de l’extérieur vers l’intérieur, selon les personnalistes, le projet jungien de la compréhension en soi où la personnalité, privée de la possibilité d’un rapport dialogique avec un partenaire concret, finit par se résorber dans la solitude et l’isolement où l’autre n’existe plus. D’où le « mal » de la névrose tellement répandue aujourd’hui aurait sa racine, selon Hans Trüb, dans la fuite du Soi devant la véritable rencontre de l’autre homme et par là même de la réalité du monde et de la vie. Les névroses se présentent à nous comme des tentatives échouées d’accéder à l’autoréalisation de son propre pouvoir.

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