Dès l’origine, non seulement la tradition chrétienne
est imprégnée des idées perses et juives du commencement et de la fin des
temps, mais elle est également remplie du pressentiment d’une sorte de
retournement énantiodromique des dominantes ; je veux parler du dilemme
Christ Antéchrist. La plupart des spéculations historiques sur le temps et les
divisions du temps sont probablement influencées depuis toujours par des idées
astrologiques, comme on peut déjà le voir dans l’Apocalypse. Il est par suite
tout naturel que mon étude ait pour centre de gravité le symbole du poisson,
étant donné que l’ère des Poissons constitue le concomitant synchronistique de
l’évolution de l’esprit au cours des deux millénaires chrétiens. Dans cet
espace du temps, non seulement la figure de l’anthropos, « le fils de
l’Homme », a été progressivement amplifiée sur le plan symbolique et, par
là, reçue psychologiquement, mais elle a également entraîné avec elle des
modifications de l’attitude humaine qui sont déjà anticipées dans les premiers
textes chrétiens sous forme d’attente de l’Antéchrist. Compte tenu que ces
écrits placent l’apparition de l’Antéchrist à la fin des temps, on est autorisé
à parler d’une « ère chrétienne » dont on suppose qu’elle se
terminera par la parousie. Tout se passe comme si cette attente coïncidait avec
l’idée astrologique du « grand mois » platonicien des Poissons.
Carl Gustav Jung : Aïon

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