Source : La Solitude du Surhumain, préface à Ainsi parlait Zarathoustra, par Paul Mathias, éditions Garnier Flammarion.
Zarathoustra
s’achève sur une fausse clôture. En attente du « grand midi », mais
non point sous un soleil qui trop opportunément réduirait l’ombre des
existants, et ainsi la problématique de l’Être. D’une certaine façon, c’est un
livre qui ne nous apprend rien, parce qu’il ne donne pas à connaître ce dont il
devrait nous instruire, le Surhomme, ce qu’il est et ce qu’il fait.
C’est pourquoi
d’ailleurs l’homme Zarathoustra est un exemple « voyageur » ou
« convalescent », mais non point un homme exemplaire ni un
« prophète. » Nul ne peut le suivre dans une pérégrination qui n’a de
sens que pour être une histoire absolument singulière, l’exhibition dépouillée,
et, parfois, délirante, d’une vie solitaire par essence et non par choix dit
« ascétique. » Être « zarathoustrien » reste une option de
benêt, un atavisme littéraire confinant à la maladie nerveuse.
Livre sans
leçon, donc, et qui, malgré les apparences, pourrait ne pas chercher à être
édifiant, un livre de solitude et sans disciples possibles. C’est tout
l’intérêt d’une œuvre dont Nietzsche est parvenu à faire autre chose qu’un
objet d’érudition. Dans cette odyssée vers le consentement de l’Être, il y a en
effet la singulière élaboration spéculative d’une sorte de « vécu
intelligible. »
Confondre Nietzsche et Zarathoustra est à cet égard extrêmement tentant, en conservant d’ailleurs les propres réserves de l’auteur-Nietzsche, qui ne voyait pas dans son personnage un autre soi, mais un être meilleur encore, comme si dans le fatum de l’écrivain, il y avait un dépassement du vivant par son propre discours.

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