La pensée de Malevitch tente de saisir les rythmes
profonds du cosmos. Il s’est procuré un petit télescope qui lui sert à observer
le reste de l’univers. « La nuit, il se consacrait à la contemplation du
ciel étoilé, il s’en occupait dans une perspective khlebnikovienne d’immersion
dans le cosmos » raconte longtemps après Mikhaïl Bahktine qui l’a
fréquenté à Vitebsk. Malevitch ne perd pas pour autant de vue le monde d’ici
bas : il voit s’établir des correspondances entre les deux. « Je me
représentais tout l’espace astronomique avec toutes les étoiles, les soleils,
les planètes. Ici, sur terre, je vois tout cet infini dans la chaleur de la
lampe, ou dans la bougie, ou dans le poêle que je remplis chaque jour. Je
regarde le mouvement des gens, des corbeaux, qui volent ici en nuées
incroyables, et transforment le grand espace en nuage et je m’y suis mis à
déchiffrer toute les nébuleuses possibles de la Voie lactée ; dans le
mouvement des gens, je vois des comètes qui parfois reviennent, mais dont
certaines ne reviennent pas. » Cependant, Malevitch ne se prend à aucun
moment pour un savant. « Je m’occupais d’astronomie, bien entendu, comme
de tout, sans en avoir aucune notion. »
Tzvetan Todorov : Le Triomphe de l’artiste

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