Comme en témoigne le terme même, la
« négativité » est l’opposition directe de « l’identité »
Si cette dernière soutient d’une façon ou d’une autre l’identité d’une chose,
c’est-à-dire son égalité à soi-même ou son immutabilité éternelle, à l’inverse,
la « négativité » nie tout cela. Pourtant, chaque négation présuppose
nécessairement ce qu’elle nie. Pour nier, il faut toujours « quelque chose
à nier » et ce quelque chose de positif doit exister indépendamment de la
négation et avant cette dernière. C’est pourquoi la « négativité »
présuppose « l’identité » ainsi que l’existence identique,
c’est-à-dire non dialectique conditionnée par l’identité. Autrement dit, prise
en elle-même (soit, en dehors, pour ainsi dire, de l’existence identique) la
négativité n’existe pas du tout. Elle est ce non-être ou ce « néant »
dont il n’y a rien à dire, tout simplement parce qu’il n’est pas. Toutefois,
pour une raison qui n’accepte aucune explication, ce néant s’introduit dans
l’existence identique « positive » et la pénètre, pour ainsi dire,
entièrement, y devenant efficient ou « actif » Or, l’actif
(l’efficient) est toujours aussi par là même actuel, effectif. Car en pénétrant
dans l’existence non dialectique conditionnée par l’identité, et en agissant en
elle et sur elle, le néant négatif ou négateur devient de ce fait un néant
actif ou effectif. Or, ce néant « actif » ou « effectif »
qui est, par voie de conséquence, en quelque sorte « réel » tout en
étant « négatif » ou « négateur », s’appelle justement
« négativité. »
Alexandre Kojève : Sophia I

Commentaires
Enregistrer un commentaire