Une bien belle chose est le métier d’espion, quand on
le fait pour son compte et au profit d’une passion. N’est-ce pas se donner les
plaisirs du voleur en restant honnête homme ? Mais il faut se résigner à
bouillir de colère, à rugir d’impatience, à se glacer les pieds dans la boue, à
transir et brûler, à dévorer de fausses espérances. Il faut aller, sur la foi
d’une indication, vers un but ignoré, manquer son coup, pester, s’improviser
soi-même des élégies, des dithyrambes, s’exclamer niaisement devant un passant
inoffensif qui vous admire ; puis renverser des bonnes femmes et leurs
paniers de pommes, courir, se reposer, rester devant une croisée, faire mille
suppositions…
Honoré de Balzac : Ferragus
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