Source : Jacob Frank, le « faux » messie, déviance de la kabbale ou théorie du complot, par Charles Novak, édition de l’Harmattan, relecture 2012-mars 2025.
Frank est enfermé à Czestochowa, haut-lieu saint du
catholicisme et du culte de la Vierge noire. Les deux premières années furent
les plus « dures. » Ses conditions de détention s’améliorèrent
lorsque sa femme et sa fille furent autorisées à l’y rejoindre le 8 septembre
1762. Frank y vécut alors une vie familiale quasi « normale. » Des
communautés frankistes s’installèrent à Varsovie, Cracovie et dans d’autres
villes et s’organisèrent clandestinement livrées à elles-mêmes pendant que
Frank était enfermé à Czestochowa.
Entre-temps, en 1761, dans la ville de Weislovits, près
de Lublin, une terrible accusation de crime rituel vit le jour. Suite à la
dégradation des relations entre frankistes et autorités rabbiniques, des
frankistes de la ville enlevèrent un enfant chrétien, et le cachèrent dans une
cave durant un mois. Ils demandèrent alors une rançon à la communauté juive de
la ville qui voulut prouver, à juste titre, qu’elle n’était pas responsable de
cet enlèvement. La communauté refusa de payer les frankistes et les frankistes,
d’après les sources rabbiniques, auraient tué l’enfant et jeté son corps dans
un endroit visible de la ville.
Les non juifs découvrirent rapidement le corps et
accusèrent les Juifs de crime rituel. Une vague d’antisémitisme déferla sur la
ville et la torture s’installa. Le rabbin de Weislovits fut torturé, puis tué,
ensuite attaché à la queue d’un cheval qui se promena dans toute la ville. Une
femme frankistes se déguisa et se fit passer pour la femme du rabbin dans le
but « d’avouer » le crime rituel. Aussitôt, la vraie femme du rabbin
fut arrêtée avec ses cinq enfants, puis torturée à son tour, et assassinée avec
ses enfants. Tous les enfants juifs de la ville furent convertis de force et
les autres juifs survivants quittèrent la ville ; Comme l’avait déjà prédit
avec effroi Jacob Emden, la confusion entre Juifs et frankistes était grandes
aux yeux des chrétiens. Cela ouvrit la porte à une longue série d’actes
antisémites qui nourrirent la confusion entre juifs et frankistes, ces derniers
vouant une lutte implacable aux talmudistes qui, pour eux, empêchaient la
rédemption d’Israël.
Frank restera pendant treize ans à Czestochowa. Treize
années pendant lesquelles la prison fut gardée par les soldats de Pulawski qui
faisaient partie de la confédération polonaise soutenue, à partir de 1770, par
les Français de Dumouriez et Dumouriez lui-même, par également le fameux
Vioménil, qui écrivit ses mémoires inédites sur la Pologne, ainsi que sur le
fameux et fougueux colonel de Choisy.
En mars 1763, une délégation frankiste se rendit à Czestochowa et obtint le droit de résidence à côté de la prison. Ainsi, les orgies mystiques et sexuelles reprirent de plus belle. Quatorze hommes et quatorze femmes pratiquaient l’échangisme comme à Iwanie. Frank avait la possibilité désormais par le biais de cette délégation résidant à côté de transmettre ses instructions à ses communautés éparpillées en Pologne. Sa geôle fut nommée Tar’a de Romi, allusion au fait que Frank était le Messie assis aux portes de Rome. Le sort de Frank était étrangement le même que celui de Sabbataï Tsevi, cent ans auparavant : Czestochowa, haut-lieu chrétien, replaçait la forteresse Gallipoli, haut-lieu de la puissance ottomane où Sabbataï Tsei fut emprisonné.
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