Ce même
Church qui, en cet instant précis, somnolait ou feignait de somnoler au soleil,
ce même Church qui roupillait paisiblement chaque nuit lové aux pieds de sa
fille, et qui avait été chaton une adorable petite boule de poils, Louis
l’avait vu harceler sans trêve un oiseau à l’aile brisée, avec dans ses yeux
une flamme glaciale de pure cruauté. Church achevait rarement les victimes de
ses jeux sadiques, mais il y avait eu au moins une exception de taille :
un gros rat qu’il avait probablement capturé dans l’étroit passage qui séparait
leur immeuble de l’immeuble voisin. Et avec ce rat, Church n’y avait pas été de
main morte. Il en avait même fait un tel carnage qu’en voyant ce sang et ces
tripes répandus partout, Rachel, qui venait d’entamer son sixième mois de
grossesse, s’était précipitée dans la salle de bains pour vomir. Oui, les chats
vivent et meurent dans la violence. Un beau jour, un chien qui ne ressemble en
rien à ces bouledogues qui s’essoufflent à poursuivre les matous des dessins
animés du dimanche après-midi leur plante ses crocs là où il faut et les
égorge ; ou bien ils se font régler leur compte par un mâle rival, avalent
une boulette de viande empoisonnée ou passent sous une voiture. Les chats sont
les bandits du règne animal ; ils vivent et meurent comme des outlaws.
Stephen King : Simetierre
Commentaires
Enregistrer un commentaire