Tel est le
paradoxe de l’heure dernière : la mort travaille avec nous dans le
monde ; pouvoir qui humanise la nature, qui élève l’existence à l’être,
elle est en nous, comme notre part la plus humaine ; elle n’est mort que
dans le monde, l’homme ne la connaît que parce qu’il est homme et il n’est
homme que parce qu’il est la mort en devenir. Mais mourir, c’est briser le
monde ; c’est perdre l’homme, anéantir l’être ; c’est donc aussi
perdre la mort, perdre ce qui est en elle est pour moi faisait d’elle la mort.
Tant que je vis, je suis un homme mortel, mais quand je meurs, cessant d’être
un homme, je cesse aussi d’être mortel, je ne suis plus capable de mourir, et
la mort qui s’annonce me fait horreur, parce que je la vois telle qu’elle
est : non plus mort, mais impossibilité de mourir.
Maurice Blanchot : De Kafka à Kafka
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