Il y a aux environs de l’art un pacte noué avec la
mort, avec la répétition et avec l’échec. Le recommencement, la répétition, la
fatalité du retour, tout ce à quoi font allusion les expériences où le
sentiment d’étrangeté s’allie au déjà-vu, où l’irrémissible prend la forme
d’une répétition sans fin, où le même est donné dans le vertige du
dédoublement, où nous ne pouvons pas connaître mais reconnaître, tout cela fait
allusion à cette erreur initiale qui peut s’exprimer sous cette forme : ce
qui est premier, ce n’est pas le commencement, mais le recommencement, et
l’être, c’est précisément l’impossibilité d’être une première fois.
Mouvement qu’on peut éclairer, non expliquer, en
évoquant ces formes et ces crises appelées « complexes. » Leur
essence, c’est qu’au moment où elles se produisent, elles se sont déjà produites,
elles ne font jamais que se reproduire ; c’est là leur trait
caractéristique : elles sont l’expérience du recommencement. « À nouveau,
à nouveau ! » C’est le cri de l’angoisse aux prises avec
l’irrémédiable, avec l’être. À nouveau, à nouveau, cela recommence encore une
fois. Le recommencement de l’expérience, et non pas le fait que celle-ci ne
réussit pas, voilà le fondement de l’échec. Tout recommence toujours, oui,
encore une fois, à nouveau.
Maurice Blanchot : L’Espace littéraire
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