L’écrivain se remet à l’œuvre. Pourquoi ne cesse-t-il
pas d’écrire ? Pourquoi, s’il rompt avec l’œuvre, comme Rimbaud, cette
rupture nous frappe-t-elle comme une impossibilité mystérieuse ? A-t-il
seulement le désir d’un ouvrage parfait, et s’il ne cesse pas d’y travailler,
est-ce seulement parce que la perfection n’est jamais assez parfaite ?
Écrit-il même en vue d’une œuvre ? S’en soucie-t-il comme de ce qui
mettrait fin à sa tâche, comme du but qui mérite tant d’efforts ?
Nullement. Et l’œuvre n’est jamais ce en vue de quoi l’on peut écrire, en vue
de quoi l’on se rapporterait à ce qui s’écrit comme à l’exercice d’un pouvoir.
Que la tâche d’un écrivain prenne fin avec sa vie, c’est ce qui dissimule que,
par cette tâche, sa vie glisse au malheur de l’infini.
Maurice Blanchot : L’Espace littéraire
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