« Quelque chose qui ne va pas ? »

 

Source : Sur Spinoza, cours novembre 1980-mars 1981, par Gilles Deleuze, édition préparée par David Lapoujade, éditions de Minuit, collection Paradoxe

C’est une espèce de monde d’épreuves. Cela n’éprouve pas quelqu’un, c’est le quelqu’un qui ne cesse pas de se mettre à l’épreuve. Il rate sa vitesse. Il rate ses lenteurs. C’est inauthentique.

Au contraire, vous savez, les jours où tout est malheur pour nous : dès le moment où on se lève, on se cogne, on tombe, on glisse, on se fait engueuler partout. Alors, on devient de plus en plus méchant soi-même. On est toujours en discordance. L’être en discordance est une manière d’être, nos jours de malheur, rien ne marche. Ça a commencé dès le matin. Quand est-ce que ça va finir ? Quelle journée ! Ce sont les journées de l’inauthentique. Chaque fois que je vais trop vite, je me cogne. Chaque fois que je vais lentement, je glisse, il n’y a rien à faire. Vaux mieux se recoucher, mais en me couchant, je ne sais pas ce qui se passe, c’est affreux aussi. Rien ne va, c’est la longue plainte de l’inauthentique. Que je suis malheureux.

Comme la pièce d’or, vous lui foutez une goutte d’acide. Ce n’est pas un jugement. C’est l’épreuve. Que peut la pièce d’or ? On ne sait pas ce que peut le corps. Que peut la pièce d’or qu’on vient de me remettre ? Supporte-t-elle l’épreuve de l’acide ? Si c’est de l’or authentique, elle le supporte. L’épreuve phyisico-chimique s’oppose au jugement moral. Finalement, ceux qui pensent dans ce sens sont toujours des immoralistes. Ils font passer une distinction entre authentique et inauthentique.

Ça ne recouvre pas du tout la distinction entre le bien et le mal. C’est une tout autre distinction. À quoi reconnaissez-vous ces auteurs ?

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