Multatuli

 

Prométhée et Atlas sont deux dieux souffrants : tlaô, racine du nom Atlas signifie « je pâtis, je souffre » (Ed. Gerhard, Kleine Schrifte, 1866) C’est peut-être la racine de tout le mystère : non plus olympien, mais titanique, le mystère d’Atlas et de l’Atlantide, celui de l’Atlantique. « Les vagues s’écoulent sur les vagues, la mer pleure, les abysses gémissent, et sous terre, dans les cavernes sombres, Hadès frissonne. Et, lumineuses comme des larmes, coulent les sources des fleuves sacrés. » (Prométhée enchaîné, Eschyle, v. 431-433) L’Olympe ignore ces pleurs, alors que la douceur la plus suave des mystères est en eux. « L’homme aime souffrir » Voilà ce que Platon voudrait dire, mais ne l’ose. S’il l’avait dit, s’il avait dévoilé le secret du mystère, les Grecs l’auraient mis à mort, comme ils faillirent le faire pour Eschyle, à cause du Prométhée. Prométhée est le père de la première humanité, Atlas de la deuxième. Tous deux aiment les hommes : ils souffrent parce qu’ils les aiment plus que les dieux. Le mystère de la souffrance est celui de l’amour de l’humanité. Tel est le feu des Titans, qui consument le monde des dieux. Atlas souffre avec la première humanité, dans l’Atlantide, dans la préhistoire noire. Prométhée souffre avec la deuxième humanité, dans l’Histoire.

Dimitri Merejkowsky : Atlantide-Europe

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