Jésus Trotinette

 

Source : Servitudes virtuelles par Jean-Gabriel Ganascia, éditions du Seuil, collection Science ouverte

Nous parvenons à une curieuse équation où l’offre et la demande viennent toutes deux des producteurs sans égard aux consommateurs. Cela conduit à une inflation vertigineuse du nombre de parution d’articles, dont presque plus personne ne se soucie. Confronté à l’immensité du savoir, le citoyen non informé en éprouvera un désarroi d’autant plus grand qu’il saura moins se repérer dans une accumulation toujours plus importante de publications moins évaluées.

Dans ce contexte, seule importe la popularité, liée au nombre moyen de citation de la revue que résume un indicateur numérique appelé facteur d’impact. Effet pervers de l’utilisation de cette métrique pour promouvoir les chercheurs, des financiers rachètent des revues réputées être réputées, du fait de leur facteur d’impact élevé pour les convertir en revues ouvertes, puis faire payer les frais de publication très élevés tout en multipliant les parutions, afin de rentabiliser leur mise. Les procédures d’évaluation par les pairs, censées garantir la qualité des parutions sont alors détournées.

À titre d’illustration, un journal international de médecin, l’Asian Journal of Medicine and Health accepta en août 200, lors de la crise de la Covid-19, sur la foi de trois rapports d’évaluation d’experts, un article canular intitulé : « Contrairement aux attentes, SARS-CoV-2 plus létal que les trottinettes : est-ce que l’hydroxychloroquine pourrait être la seule solution ? » et où figure entre autres, dans la liste des auteurs, Didier Lembrouille…

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