Dans un passé immémorial, difficilement concevable pour
nous, les femmes et les hommes vivaient, se parlaient, s’envoyaient des
lettres, écrivaient des livres et se mariaient. Mais le faisaient-ils de la
même manière que nous, maintenant ? Les significations à accorder à toutes
ces notions fondamentales diffèrent sensiblement aujourd’hui de ce qu’elles
étaient hier, car nous sommes presque tous susceptibles d’être en ligne, à un
moment ou à un autre de notre journée, consciemment ou pas. À cet égard, même
si nous ne nous connections pas volontairement, nos montres, nos téléphones,
nos chaussures, nos vélos et nos voitures le font à notre place et contribuent
ainsi à notre existence sociale en diffusant à tout moment des informations sur
nos personnes. Là où l’existentialisme de Sartre se résumait à
« L’existence précède l’essence », nous pouvons aujourd’hui résumer
la condition humaine comme suit : « La présence en ligne précède et
conditionne l’existence sociale.
Jean-Gabriel Ganascia : Servitudes virtuelles
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