« Êtes-vous à l’abri d’un dérapage ? »

 

Nous sommes tous à la merci d’une indiscrétion malveillante qui, dévoilant des propos ou des comportements innocents et les sortant de leur contexte, les retourneraient contre nous et en feraient des armes de destruction personnelle à notre encontre. Nous constatons là, avec l’emprise que prennent les réseaux sociaux, une réécriture complète du concept de censure. Cela passe d’abord par une négation du terme, que plus personne n’emploie en un sens positif. Cela correspond ensuite à un abandon de la censure institutionnelle d’État qui disparaît, du moins, dans les démocraties occidentale, celles-ci renonçant à filtrer les contenus, tout en renvoyant à la justice le soin de trancher les cas litigieux. Cela passe enfin par une délégation de l’autorité de la censure à des acteurs privés, chargés d’opérer le filtrage à la place des États. Cette délégation induit à la fois une automatisation de la censure, une quasi-absence de recours de la part des personnes censurées, et surtout, une accentuation des critères d’exclusion qui répondront aux exigences qu’imposeront tous les groupes de pression. Il en résulte une nouvelle censure morale s’appliquant de façon sauvage, sans la régulation d’acteurs étatiques.

Jean-Gabriel Ganascia 

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