Grands Mystères

Source : Métaphysique du sexe par Julius Evola, éditions de L’Âge d’homme, Guy Trédaniel, traduction et préface de Philippe Baillet, relecture en cours, 2009-2024, livre important

Si la femme peut donner la vie, elle barre ou tend à barrer l’accès à ce qui est au-delà de la vie. Là encore, il s’agit d’un thème que l’on rencontre fréquemment dans l’univers des légendes et des mythes héroïques. Typique, par exemple, est le mythe relatif à une femme céleste qui, tout en aidant et en protégeant le chaman, cherche à ne l’avoir que pour elle au septième ciel, et s’oppose à la poursuite de son ascension. Elle lui dit que la voie supérieure est coupée de la tente avec une nourriture céleste. Dans les légendes héroïques, l’amour d’une femme aux traits plus ou moins surnaturels est souvent présenté comme un obstacle et un danger pour la protagoniste que comme une aide.

En rapport avec tout cela, il est fondamental de distinguer deux types de Mystères, que nous pouvons appeler les Grands Mystères et les Petits Mystères, ou encore les Mystères d’Ammon et les Mystères d’Isis : en dehors, cependant, d’une référence historique rigoureuse à la physionomie effective des institutions sacrées antiques qui peuvent être ainsi désignées, et plutôt en fonction d’une définition morphologique générale. Les Petits mystères ou Mystères d’Isis peuvent donc être définis comme les Mystères de la Femme, ceux dont le but est la réintégration « cosmique » de l’individu, sa réunion avec la substance féminine, force-vie, et substrat de la manifestation.

Ces Mystères peuvent avoir un caractère démonique aussi bien que lumineux, selon la fonction qu’ils remplissent : démoniques sous les formes et dans les situations où l’on vient de parler, correspondant à une absolutisation par rapport à tout ce qui est « supracosmique. » Cette tendance n’est pas toujours directement perceptible. Mais même lorsque le principe de la Femme ou de la Mère se transfigure pour devenir une Mère Divine ou Mère du Dieu, un thème présent depuis l’Antiquité égéenne et dans le culte isiaque lui-même, dont l’iconographie connaissait la déesse à l’enfant, qui est, sous un certain aspect, la Januna Coeli chrétienne, même dans ce cas, la limite n’est pas franchie.

Les Grands Mystères ou Mystères d’Ammon peuvent être définis comme ceux en rapport avec la « ré-ascension », le reflux du courant vers le haut, le dépassement du niveau « cosmique » ; ils se tiennent donc sous le signe de la virilité transcendante, ouvrant la série des situations où c’est celle-ci qui l’emporte de plus en plus nettement.

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