En 1897, Léon Bloy confiant à Clotilde, la Femme pauvre, le début d’un poème que Marchenoir avait répété à son mari Léopold et dont celui-ci n’avait retenu que les premiers versets. De la vigne abandonnée, l’horizon s’élargit à l’univers entier où marche le Pèlerin à la recherche du Paradis terrestre. « Seul entre tous les hommes, il se souvenait de la fournaise de magnificences d’où leur espèce fut exilée, pour que commençassent les douleurs et que commençassent les temps. » Ainsi, Léon Bloy ne se souvient-il pas seulement comme il aime à le répéter de l’avenir, c’est-à-dire des catastrophes en chaîne, de plus en plus méritées par l’espèce humaine. Son Pèlerin déroule dans sa mémoire les splendeurs d’avant la faute et en demeure obsédé. Sa vie, comme celle du Désespéré, est une marche qui, cette fois, sera récompensée. C’est dans un cimetière de lépreux qu’est planté l’Arbre de vie et qu’il trouvera la force de mourir d’amour. Le cadre poétique, on le voit, d’une autre façon que les anathèmes du pamphlet ou les gémissements et les malédictions de l’Histoire, éclaire la robustesse, la carrure, l’infatigable résistance de la foi de Léon Bloy. Tous les poètes, on le sait, combattent contre le temps ; mais quand on définit le temps par le péché, on indique la route du Buisson ardent.
Jacques Vier : Léon Bloy, un pont sur l’abîme
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