« Der letzte Gott »

 

Source : Martin Heidegger, philosophie d’un autre commencement par Alexandre Douguine, éditions Ars Magna, collection Heartland.

Le dernier Dieu est une figure mystérieuse. Heidegger fait soigneusement la différence entre lui et les protagonistes de toutes les religions connues. Cependant, il ne s’agit pas d’une image individuelle vide ou d’une métaphore. Chez Heidegger, qui a rejeté à la fois la religion et l’athéisme en raison de leur dépendance totale à l’égard de la topographie philosophique du premier commencement, on peut trouver des indices d’une théorie très particulière du divin. Il n’aborde pas directement le sujet, mais nous pouvons tenter de reconstruire le cours de sa pensée qui conduit à l’introduction du Dernier Dieu dans son eschatologie de l’Être.

Heidegger pense avant tout à l’autre commencement, qui doit se dérouler selon un scénario différent, par rapport au premier commencement de la philosophie grecque, et conduire à l’Ereignis. Le premier commencement comprenait le passage de l’ontique à la pensée philosophique ontologique, mais les Grecs anciens croyaient en des dieux. 

Heidegger ne s’intéresse pas à la structure de la religion grecque antique. Il s’intéresse à la manière dont la conscience philosophique des Grecs, faisant un saut dans l’abîme, a conçu les dieux et la divinité. L’aspect le plus important de cette conception est que les dieux ne sont pas l’Être, mais ils ne sont pas non plus des étants.

En outre, les dieux ne sont pas des personnes ; ils ne sont absolument pas humains. Selon Heidegger, ces dieux ont cependant besoin de l’Être-Seyn pour enregistrer leur divinité. Ils ne sont pas essence ou non-essence. Leur principale caractéristique est la légèreté. En outre, les dieux sont indifférents aux hommes ; ils ne les sauvent, ni ne les punissent. Les dieux passent devant les personnes mais cela ne se produit que lorsque les gens se tournent vers l’Être de leur humanité et honorent suffisamment l’Être en tant que Seyn en le faisant.

Dans un cas, les gens s’orientent vers le sacré, et le sacré offre un espace au divin, tandis que le divin permet aux dieux de se rassembler autour du foyer de l’Être-Seyn. Les personnes responsables de l’Être doivent, contrairement aux autres étants, structurer correctement cette responsabilité et servir l’Être en conséquence.

Cela permettra aux dieux d’apparaître, mais si l’homme remplace l’Être-Seyn par l’Être-Sein, la métaphysique, l’ontologie, la volonté de puissance, et finalement, la technique, ces dieux légers s’envoleront facilement sans laisser de traces derrière eux, en prenant leurs distances. Les dieux s’éloignent du platonisme, du théisme, du déisme, de l’athéisme, de tout ce qui « impose intentionnellement » aux étants une représentation préconçue et ne permet pas à l’Être-Seyn de transparaître et d’illuminer les étants afin que les dieux se rassemblent dans cette lueur.

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