Il est plus simple de faire fuir un dieu plutôt que de
le tuer. Il n’est pas nécessaire de mener de longues opérations militaires
coûteuses, de faire preuve de ruse, de répartir les ressources et de former des
escouades, ni de réfléchir à des stratégies de défense et d’attaque. Il suffit
de fermer au moins une des directions du Geviert, d’extraire un fragment
de la carte générale de l’ontologie fondamentale du monde, même si c’est un
fragment insignifiant. Cela entraînera la fuite des dieux. Ils ne supportent
pas la rudesse, la stupidité, le mauvais langage, le manque de gentillesse, la
discourtoisie, et, surtout, ils ne supportent pas les espaces clos, les portes
claquées, les formes, les idées, les pensées et les choses finalisées. Les
dieux sont l’ouverture et l’union. Tel était le logos divin d’Héraclite :
si son murmure reste inaudible, si l’unité des étants qu’il ouvre reste sans
réponse, il se cache aussitôt, car les parties coupées de l’unité tombent à une
distance infinie.
Alexandre Douguine : Martin Heidegger, philosophie d’un autre commencement
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