« Écrire, c’est se déréaliser et lire, se dépersonnaliser »

 

Sa vie s’est consumée dans la lecture. Ce qui pose le problème crucial, pour son identité et pour la logique de la fama : de savoir si la vie qu’il a ainsi vécue est vraiment la sienne. Quelle est la relation exacte entre vivre et lire ? Car si la « vie » est bien, pour chaque individu, la somme de ses expériences propres, alors, qu’en est-il d’une vie entièrement passée à la lecture ? La lecture, en effet, c’est l’expérience guidée que l’on fait des pensées et de l’expérience d’un autre, c’est une aliénation méthodique et volontaire, où l’on vit « une autre vie » que la sienne (Henry James) et l’on n’aboutit ainsi à cet étrange paradoxe : qu’il est « impossible de ne pas vivre. » (Borges, Entretien) lors même que la lecture dévore sa vie propre. La vie altérée des lectures devient à son tour une vie propre d’un autre style.

Nothing Is Real : Only the wicked are pure
Raphaël Lellouche : Borges, l’hypothèse de l’auteur

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