C’est toujours Odin qui fonde la nécromancie. Sur son
cheval, il pénètre dans le Hel et ordonne à une prophétesse morte depuis
longtemps de se lever de la tombe pour répondre à ses questions. D’autres dieux
ont pratiqué depuis ce genre de nécromancie, qui, évidemment, n’est pas du
chamanisme stricto sensu, mais participe à un horizon rapproché. Il faudrait
citer la divination avec la tête momifiée de Mimir, dans la saga du Völuspa,
qui fait songer à la divination des Yukaghirs à l’aide des crânes des anciens
chamans.
On devient prophète en s’asseyant sur les tombes et on
devient poète, inspiré, en dormant sur le tombeau d’un poète. Même coutume chez
les Celtes : le fili mangeait de la chair crue d’un taureau, buvait
de son sang et dormait ensuite enveloppé dans sa peau ; pendant son
sommeil, des « amis invisibles » lui communiquaient la réponse à la
question qui le travaillait. Ou encore, on dormait directement sur la tombe
d’un parent ou d’un ancêtre et on devenait prophète.
Typologiquement, ces coutumes se rapprochent de
l’inspiration ou de l’initiation des futurs chamans ou magiciens qui passent la
nuit auprès des cadavres ou dans les cimetières. L’idée sous-jacente est la
même : les morts connaissent l’avenir, ils peuvent révéler les choses
cachées. Le rêve joue parfois un rôle similaire : dans la G’sla Saga,
le poète montre le sort de certains privilégiés après la mort.
Mircea Eliade : Le Chamanisme et les techniques de l’extase
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