« Et cela se passait dans des temps très anciens »

 

Vous avez compris l’art prismatique aux lueurs troubles et multiples de cet orfèvre magicien. Oh, le feu sourd et changeant qui dort dans ses bijoux, les détails de nature, animaux ou fleurs, qui y sertissent l’eau des gemmes. L’avez-vous assez bien chantée cette flore orfévrie, à la fois byzantine, égyptienne et Renaissance. En avez-vous saisi les aspects de madrépores et de joyaux sous-marins, oui, sous-marins, car, fleuris de bérils, de péridots, d’opales et de saphirs pâles, couleur d’algues et de vagues, d’un émail céruléen presque, ils ont l’air de joyaux restés longtemps au fond de la mer. Animaux de Salomon, coupe du Roi de Thulé, ils sont surtout l’écrin des villes englouties, et la fille du roi d’Ys devait en porter de semblables quand elle livra les clés des écluses au Démon. Les colliers de Barruchini, ces ruissellements de pierres bleues et vertes, ces bracelets trop lourds incrustés d’opale, Gustave Moreau en a fleuri la nudité de ses princesses maudites. Ce sont les joyaux de Cléopâtre et de Salomé ; ce sont aussi des joyaux de légende, des joyaux de clair de lune et du crépuscule.

Jean Lorrain : Monsieur de Phocas

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