Escarboucle

 

Source : L’Alchimie au Moyen Âge, aux frontières de l’impossible par Wilhelm Ganzenmüller, éditions Marabout, collection Univers secrets

Nous savons que les alchimistes se livraient à la fabrication de pierres précieuses artificielles. Pour les colorer, ils employaient les oxydes métalliques, de tout temps connus : le cuivre brûlé (oxyde cuivrique) pour l’émeraude, la céruse pour la topaze, etc. Pour le rubis l’escarboucle, ils prescrivaient l’emploi de l’or. Il est donc possible que les alchimistes arabes et deux du moyen âge aient au moins pressenti qu’on peut, à l’aide de l’or, colorer en rouge une masse de verre et imiter ainsi le rubis. Le Lapidaire de Lulle, par exemple, donne pour fabriquer la pierre philosophale, la même recette que pour fabriquer de faux rubis, avec cette différence que la masse à colorer n’est pas du verre, mais « la substance obtenue par alchimie à partir de la matière première. »

Cette présomption que la pierre philosophale a des rapports avec le verre coloré à l’aide du « pourpre d’or » est appuyée par le fait qu’on cherche toujours à assimiler l’or à la pierre philosophale. Des phrases telles que « comme une petite quantité de levain fait lever une grande quantité de pâte, ainsi, la petite feuille d’or ou d’argent engendre l’élixir et fait fermenter toutes choses. » De telles phrases se trouvent chez Zosime et ont été transmises à travers la littérature arabe aux alchimistes d’Occident. On les retrouve dans le Livre des aluns et des sels, chez Geber, Arnaud de Villeneuve, Lulle et bien d’autres. Il est remarquable que cette théorie ait été confirmée par la science moderne : en effet, si l’on veut imiter la couleur dorée des métaux, l’opération est grandement facilitée par l’adjonction d’une très petite quantité d’or.

Voici comment Ortulanus décrit la pierre philosophale : « Cela devient une pierre de plus en plus rouge, transparente, fluide, liquéfiante, qui peut pénétrer le mercure et tous les corps durs ou tendres, et les transformer en une substance propre à faire de l’or ; elle guérit le corps humain de toutes les faiblesses et lui rend la santé ; grâce à elle on peut forger le verre et colorer les pierres précieuses en un rouge brillant comme l’escarboucle.

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