Source : Les Grandes énigmes de l’Apocalypse, la clé des symboles, par Philippe Plet, éditions Salvatore, relecture 2017-2023.
L’Ancien Testament désigne sous les traits de bêtes
monstrueuses les empires qui se disputent le monde et qui menacent constamment
Israël, aux plans politiques, par la conquête, et au plan religieux, par
l’idolâtrie. Un exemple typique est celui des quatre énormes bêtes vues par
Daniel (Dn 7, 1-8) : elles sortent toutes de la mer, et elles sont des
empires successifs qui conquièrent le monde.
Ces bêtes sèment la mort sur leur passage et elles
asservissent les peuples. Elles sont une image de l’intervention des forces
maléfiques dans le monde, qui manipulent les hommes pour leur faire réaliser
leur propre dessein. Leur religion est toujours la même : le culte de la
puissance.
Le Dragon de l’Apocalypse fait surgir de la mer une
telle Bête : la « Bête de la Mer » (Ap 13) C’est par son
intermédiaire, on le verra, que le Dragon opérera sur la terre de façon
concrète, sociologique. Ainsi, le Dragon demeure un symbole se référant à la
nature du mal en soi, tandis que les deux autres Bêtes qu’il suscite sont des
symboles maléfiques qui nous montrent l’action du mal dans le monde. Le Dragon
est le principe du mal, inaccessible à l’intelligence humaine et les deux Bêtes
sont ses modalités d’action.
Le Dragon a « sept têtes et dix cornes. »
C’est un peu de son intériorité qui nous est dévoilé par cette description
mystérieuse. La « tête » désigne l’intelligence, tandis que la
« corne », qui est une arme naturelle est le symbole de la puissance.
Dans la vision de Daniel, les quatre bêtes sont quatre rois et les cornes
désignent également des rois et leurs royaumes. (Daniel 7, 17-23-24) Ces cornes
ne sont pas seulement des réalités politiques, mais aussi d’ordre
spirituel : « Je regardai et cette corne faisait la guerre aux saints
et l’emportait sur eux. » (Daniel 7, 21)
On retrouvera ce symbolisme lors de la description de
la Bête écarlate portant Babylone et qui n’est autre que le Dragon
lui-même : ses dix cornes sont dix rois (Apocalypse 17, 12) Mais dans la
vision du Dragon qui nous occupe à présent, les dix cornes ont une valeur plus
générale, celle de la puissance considérée en tant que telle. Ce qui est
frappant et même « monstrueux » au sens strict, c’est le déséquilibre
entre le nombre des têtes et celui des cornes. La dysharmonie de la répartition
de la puissance (les cornes) par rapport à l’intelligence (les têtes) est une
caractéristique de la nature démonique.
Cela traduit le culte du pouvoir sur les esprits, qui est la fin poursuivie par le Dragon dans sa guerre contre Dieu et les sains. En effet, la puissance, prise au sens absolu, dépasse les modalités matérielles qui l’expriment (les richesses et le pouvoir politique) pour devenir une pure fascination, une idole érigée en lieu et place du divin. Telle est la fascination incroyable qui constitue l’intériorité du Dragon. Le texte précise encore que « chaque tête est surmontée d’un diadème » ce qui montre que l’intelligence du Dragon est totalement absorbée par des rêves de domination.
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