Vendredi tout est permis

Source : Sabbataï Tsevi, le messie mystique, 1626-1676, par Gershom Scholem, éditions Verdier, collection Poche, relecture 2010-2024, un livre essentiel.

Un signe frappant et révélateur de la transformation messianique de l’ancien ordre des choses et de la substitution d’un judaïsme messianique au judaïsme traditionnel et imparfait, fut l’innovation qu’introduisit Sabbataï en appelant les femmes à la lecture de la Torah. Il est évident que Sabbataï envisageait un changement du statut de la femme.

Ce qui est confirmé par Coenen qui n’avait pas connaissance de cette innovation précise, mais qui rapporte d’autres détails allant dans le même sens. L’explication, peu convaincante, qu’en avance Coenen est que ces mesures féministes de la part de Sabbataï étaient d’habiles stratagèmes destinés à gagner les femmes à sa cause ; mais, dans la situation social de l’époque, le soutien des femmes n’était guère une aide conséquente. En outre, il n’avait pas besoin de stratagèmes car ce soutien lui était assuré par le seul jeu de l’hystérie collective qui régnait alors.

En réalité, Sabbataï, dans la vie duquel l’amour ou la faveur des femmes ne jouèrent jamais un rôle bien défini, rêvait effectivement d’une réforme radicale de la condition de la femme. Etait-ce Sarah, sa belle épouse, qui demandait cette liberté afin d’assouvir ses désirs sensuels ? Il nus faut être prudents et ne pas lui accorder trop d’influence. De fait, seuls les deux poèmes satiriques des frères Frances lui attribuèrent la responsabilité d’avoir incité Sabbataï à usurper le titre messianique et il est possible à démontrer la fausseté de cette accusation, même si il est possible de démontrer la fausseté de cette accusation, même si elle a la faveur de l’écrivain et dramaturges modernes. Il n’empêche que les deux frères Frances ont pu avoir confusément senti le pouvoir de ce que les kabbalistes nomment le « principe femelle » à l’œuvre dans l’imagination de Sabbataï.

Ce que nous savons de sa pensée est suffisant pour nous passer de Sarah dans l’explication des réformes féministes qu’il préconisait. Sabbataï commença à s’opposer ouvertement et délibérément, à la distribution traditionnelle des rôles dans le comportement des deux sexes. Dans les maisons de ses amis, il rencontra ses deux anciennes épouses et s’assit à leurs côtés, pour converser amicalement. Des lettres d’Italie rapportent qu’il bafoua toutes les règles de décence en offrant un banquet au cours duquel hommes et femmes dansèrent ensemble alors que lui-même se retira dans une autre pièce, en compagnie d’une autre femme.

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