« Nous avons toujours choisi les
sentiers de chamois », écrivait Lou Salomé dans son Journal, avant
d’ajouter : « Si quelqu’un nous avait entendu, il aurait cru
surprendre la conversation de deux démons. » L’entretien démoniaque consiste
ici notamment à composer des aphorismes de façon conjointe, dont l’ébauche est
laissée à Lou, dont l’achèvement est le fait de Nietzsche. Est-ce par ce chemin
de chamois que les entretiens « mènent involontairement vers les
gouffres », en « ces lieux de vertige que l’on a sans doute déjà
escaladés seul ? » Ainsi chacun refait avec l’autre ce qui est déjà
son propre chemin de solitude, mais « afin de plonger son regard dans
l’abîme. » Nous savons que Lou a déjà, écrit-elle, commencé de faire
comprendre à Rée « ce qu’une vie amoureuse définitivement close et un
besoin illimité de liberté me poussaient à réaliser. » C’est seulement
lorsqu’elle aura rejoint la trentaine que Lolja Salomé va découvrir et
reconnaître expressément que « recevoir le sperme » est délice et
sentiment océanique.
Jean-Pierre Faye : Nietzsche et Salomé
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