De la planète Mars

 

Ill. : I turned out into a Martian / Misfits. Texte : Voir l’invisible, histoire visuelle du mouvement merveilleux-scientifique (1909-1930) par Fleur Hopkins-Loféron, éditions Champ Vallon, collection Détours, recommandé par Neûre aguèce

En 1906, l’article de Charles Torquet, paru dans Je sais tout, « L’Appel d’un autre monde », a été écrit après que des observateurs ont mesuré la répétition de trois points envoyés aux télégraphes, la nuit : « Il y a quelqu’un qui télégraphie mais cela ne vient pas de la Terre. » Partant du principe que s’il est possible d’envoyer des messages aux antipodes grâce aux ondes radio, rien ne s’oppose à ce qu’il soit possible d’envoyer des messages à quelque extraterrestre, plusieurs savants imaginaires utilisent le principe de la télégraphie sans fil pour soumettre leurs missives.

Dans Le Docteur Oméga, aventures fantastiques de trois Français dans la Planète Mars (1906), d’Arnould Galopin, le docteur Oméga, qui s’est écrasé sur la planète rouge avec son équipage, met au point un « appareil de télégraphie sans fil. » Il émet en Morse et parvient, alors que tout semble perdu, à recevoir une dépêche de la Terre : « Parbleu, je savais bien que les ondes hertziennes se comporteraient à travers l’espace comme des ondes lumineuses. » Galopin fait peut-être ici allusion à une théorie de l’époque qui voulait que les ondes hertziennes ne puissent parvenir aux Martiens car un bouclier entoure la Terre.

Le système de communication télégraphique est décliné par certains savants sous la forme de signaux lumineux ou enflammés dans le but de reproduire l’alphabet Morse à la surface d’un astre. Auteur vernien dans l’âme, Pierre de Sélènes imagine un banal alphabet lumineux, changé toutes les heures et visible au moyen d’un appareil oculaire très puissant : « Signaux lumineux alphabétiques apparus distinctement, cette nuit, à intervalles réguliers, sur partie obscure du disque lunaire… »

Pour répondre aux explorateurs, les Terriens utilisent eux aussi la télégraphie optique et disposent dans le désert des projecteurs représentant les diverses lettres de l’alphabet. Un clavier permet d’activer une à une les lettres, de sorte à former, en quelques heures, une phrases. Encore, quand Robert Darvel est envoyé de force sur Mars par son ennemi fakir dans Le Prisonnier de la planète Mars de Gustave le Rouge (1906) il utilise l’alphabet Morse afin de détacher sur la surface rocailleuse une succession de points et de lignes, réalisés à l’aide d’une puissante source lumineuse et visible des Terriens qui ont recours à la photographie interplanétaire. C’est par ce moyen ingénieux qu’il relate à ses amis, restés sur Terre, ses étonnantes aventures martiennes.

Régulièrement, les savants mettent l’accent sur la nécessité de moduler les signaux lumineux, à force de prouver à celui qui viendrait les apercevoir, qu’ils sont produits par une société pensante. Jacques Spitz s’en amuse dans son roman Les Signaux du soleil (1943) Des taches solaires, produites à la surface de l’astre, font supposer à l’humanité que des populations inconnues tentent d’entrer en contact avec eux. Incapables de développer une technologie suffisamment avancée pour leur répondre, les Terriens manquent d’être éliminés par ces envahisseurs, qui avaient envoyé des signaux pour vérifier si le globe était occupé.

Parmi tous les procédés utilisés pour la communication interplanétaire, la télépathie interstellaire, soutenue par Camille Flammarion, tient une place à part. Ainsi, le 24 octobre 1928, le docteur anglais en droit Mansfield Robinson, qui prétend converser régulièrement avec la martienne Oomaruru par le biais de ses facultés télépathiques et voyager sur Mars en quatre minutes seulement grâce à son « spycho-teleâthic-motormeter », est moqué par la presse française. Il obtient de la station d’Hillerton qu’elle envoie un radiogramme sur une longueur d’ondes de 18740 mètres, soit neuf fois la lettres M et le message « Opesti Nipipia Secomba » et attend une réponse de Mars entre 30 et32000 mètres de longueur d’ondes. Il prétend en capter une grâce à un appareil de sa conception. Plusieurs autres personnes sensitives prétendent pouvoir entrer en communication avec Mars par télépathie, comme la médium Hélène Smith.

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