Perdurabo

La hiérarchie est pouvoir et gouvernement sacré non seulement parce qu’elle est exercée par des sujets divins (les anges) et parce qu’elle s’exerce sur les res sacrae. Elle est sacrée parce qu’elle est un pouvoir qui a pour tâche première de rendre divins ses sujets : la hiérarchie est le pouvoir littéral du sacrum facere, c’est-à-dire visant, au sens littéral, à faire, à produire le divin. En ce sens, un tel pouvoir représente la forme achevée de ce que la pensée néoplatonicienne, dans le sillage des Oracles chaldaïques, avait appelé « théurgie. » L’idéal théurgique de l’Antiquité tardive se portait en opposition immédiate à l’idéal théologique : si la théologie faisait de la connaissance intellectuelle du divin le but premier du commerce avec les dieux, la théurgie, en revanche, concevait le savoir comme un moyen de produire des opérations capables de réaliser une union effective et factuelle (drastike henosis) avec la divinité. La théurgie était une technique de la pratique divine et divinisante : plus qu’une science, c’était une série d’activités rituelles (theia erga) ou d’actions sacrées, capables de rendre divins ceux qui l’accomplissaient. Selon la définition tardive et contestée de Psellos, le théurge est celui qui transforme les hommes en dieux : « theous tous anatrhopous ergazetai. »

Emanuele Coccia : Hiérarchie, la société des anges

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