Pas de Kafka, pas de chocolat !

 

Je pense à une phrase très belle de Kafka. Dans une lettre, il dit ceci : ce qui compte finalement, ce n’est pas le visible, c’est détecter les puissances diaboliques de l’avenir qui frappent déjà à la porte, qui, d’une certaine manière, sont déjà là, mais ne sont pas visible. Il y a du visible, mais il y a quelque chose encore qui est, en dessous ? Pas visible ? Les puissances diaboliques de l’avenir qui frappent déjà à la porte. Premier stade : je peins un spectacle horrible et une bouche qui crie devant ce spectacle. Si beau que ce soit, c’est encore du figuratif et du narratif. Deuxième stade : j’efface le spectacle, je ne peins plus que la bouche qui crie. Il m’a fallu passer par le diagramme, par la catastrophe qui entraînait toute figuration. Peindre la bouche qui crie seulement, cela veut dire en fait que je ne la peins pas seulement, mais qu’à ce moment-là, j’ai capté les puissances qui font crier, de telle manière que la bouche qui crie devienne aussi bien l’amie que l’ennemie de ces puissances. Ces puissances sont comme transformées. C’est curieux, tout cela.

Gilles Deleuze : Sur la peinture

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