Dans Les Miroirs abominables,
dans l’Histoire de l’infamie, Borges écrit : « La Terre que
nous habitons est une erreur, une parodie sans autorité. Les miroirs et la
paternité sont chose abominable car ils la confirment et la multiplient. La
nausée est la principale vertu. Deux disciplines peuvent nous y conduire :
l’abstinence ou l’excès, la luxure ou la chasteté. » Ajoutons :
le beau comme le laid, le laid comme le beau. Lorsqu’on soulève le voile du
Calife à la Face resplendissante, on découvre une face enlaidie par la lèpre,
enflée comme un masque, avec de lourdes protubérances et un nez aplati. Arracher
le voile du beau est un acte sacré. Peut-on interpréter ainsi l’invasion si
troublante de notre monde par les mille difformités du laid ? Le laid et
les artistes du laid sont-ils, sans le savoir, en train de sauver notre monde.
Georges Nivat : Salut par le beau, salut par le laid
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