Les
coïncidences, Bacon ne les prenait pas à la légère. Malgré son aversion
affichée pour le mysticisme et la religion, c’était un grand superstitieux,
fasciné par les phénomènes paranormaux. Il guettait les signes de chance ou de
malchance, selon le cas. Pour lui, la réussite consistait à « mettre les
dieux de son côté », tant dans la peinture que dans n’importe quel jeu de
hasard. Il aimait à dire qu’un seul coup de pinceau peut révéler ou effacer le
sens d’une image à demi achevée. De même, Bacon avait mis au point sa méthode
personnelle pour la roulette. À l’en croire, il faisait semblant de miser sur
le tapis, alors qu’il écoutait une voix de croupier censée lui annoncer les
numéros gagnants, avant l’arrêt de la roue. Les coïncidences apportaient de
l’eau au moulin de Bacon, venaient fertiliser l’espèce de compost, amoncelé sur
le sol de l’atelier, d’où surgissaient des images : le visage d’un amant
déformé dans le miroir, une publicité arrachée à un magazine ou la reproduction
d’un Rembrandt surnageant du fatras sous les allées et venues incessantes.
Elles esquissaient des contours en pointillés, déclenchaient des associations
d’idées qui continuent à éveiller des échos longtemps après, parce qu’elles ne
livrent jamais leurs significations cachées.
Francis
Bacon : Personnage descendant d’une voiture
Michael
Peppiatt : Francis Bacon
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