Le moulin à prières au Tibet :
c’est un phénomène assez mystérieux, il faut le dire : le sujet met à
l’intérieur du moulin à prières un papier, puis il le fait tourner ; le
mystère, c’est que je peux parfaitement penser à autre chose pendant que ça
tourne ; objectivement, qu’est-ce que je fais : je prie. Mais me
direz-vous : ceci n’est valable que pour des sociétés primitives ? Si
on passe, à l’autre extrême, au « canned laughter », ce que
l’on appelle, le rire en boîte, le rire inclus dans la bande sonore d’un
programme télévisé, le mystère alors quel est-il ? Lorsque je regarde une
telle émission, je ne ris pas, je me contente de fixer l’écran, fatigué après
une journée de travail et cela fonctionne : c’est la télé qui rit pour moi
et c’est un grand soulagement. On n’a donc pas beaucoup progressé par rapport
aux sociétés primitives.
Slavoj Žižek : La subjectivité à venir
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