Zinoviev se présente comme un homme « sans
illusions », à la fois quant à la Russie soviétique et quand à l’Occident.
Peut-être est-il le plus amer de tous les dissidents, parce qu’il évite de
manifester littérairement son tourment et qu’il reste intérieur. Il réussit
même à faire figure d’homme détaché dans les Hauteurs béantes,
dissimulant sa tristesse, à la manière de Swift derrière l’humour caricatural.
C’est cependant dans L’Avenir radieux qu’il a étonné les Occidentaux, du
moins ceux qui sont peu portés à l’analyse politique, lorsqu’il allègue que les
Russes sont tellement habitués à l’oppression que, même libres, ils voteraient
pour elle. C’est que le régime soviétique se maintient non pas seulement par la
violence, finalement superflue, mais par le consentement de la population
peut-être parce qu’elle n’a jamais connu autre chose. Il utilise cette manière
pour mettre l’Occident en garde contre l’illusion démocratiste, qui risque de
se retourner contre lui-même, en cas d’effondrement de l’appareil soviétique.
Julien Freund : La Décadence
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