« Profite de la guerre, la paix sera terrible »

 

Source : Conduire la guerre, entretiens sur l’art opératif, Benoist Bihan et Jean Lopez, éditions Perrin, un livre important.

La guerre froide est une victoire par forfait. Quoi que puissent prétendre a posteriori les Américains, il me semble difficile d’affirmer qu’ils ont, à eux seuls, provoqué la chute de l’U.R.S.S. L’effondrement de l’Union et du bloc soviétiques tient surtout aux décisions des dirigeants soviétiques eux-mêmes, tant au plan économique qu’en termes de gestion politique de leurs satellites. Allons plus loin ; Khrouchtchev est sans doute le dernier dirigeant soviétique à viser des buts positifs, dépasser les pays capitalistes, et encore ces buts s’inscrivent-ils plutôt dans une logique de compétition de modèles que d’affrontement des blocs.

Mais ensuite, c’est une logique de repli qui l’emporte chez Brejnev et ses successeurs cacochymes : le Souverain soviétique ne fixe plus que des buts négatifs, ne pas perdre la face, ne pas se laisser distancer. Le rêve de révolution mondiale est mort avant Staline lui-même… La dernière offensive stratégique directement inspirée par Moscou est celle qui vise la Corée du Sud en 1950 ; sa finalité est d’étendre le glacis qui protège l’U.R.S.S. dans la contiguïté de la guerre russo-japonaise de 1905. Ceci doit amener à relativiser « l’affrontement » de manière évidente après la mort de Staline, et définitivement après l’éviction de Khrouchtchev en 1964, l’U.R.S.S. consacre l’essentiel de son énergie à survivre et à contrôler ses satellites, pas à subvertir l’Occident.

Le communisme ne s’est pas effondré comme idéologie parce que l’U.R.S.S. est tombée. Il me semble au contraire que c’est l’inverse qui s’est produit : l’échec patent du communisme à la fin du vingtième siècle retire sa raison d’être à l’U.R.S.S. et précipite sa fin. 

Gorbatchev était-il encore communiste ?

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