Un livre est fini lorsqu’on peut penser l’avoir porté
le plus loin possible, c’est-à-dire avec la conscience d’une limite
infranchissable, que seul le livre lui-même peut franchir, ou plutôt quelques
lecteurs, qui le porteront à sa fin et au-delà de sa fin. Mais le sentiment que
le livre idéal vous a échappé, alors qu’il existait déjà tout entier, depuis
longtemps, dans une brume somnambulique, d’où il suffisait de l’arracher fragment
par fragment, ce sentiment persiste comme réaction vitale d’un objet qui, après
s’être déployé de son vivant, désormais, se rétracte et fait le mort, avant de
plonger dans un sommeil sans rêves.
Jean Baudrillard : Cool memories IV
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