La production, le marché, l’idéologie, le profit,
l’utopie, tout cela était moderne ; l’économie capitaliste concurrentielle
était moderne ; la nôtre, irréelle, spéculative, sans même l’idée de
production, de profit et de progrès, n’est plus moderne, elle est postmoderne
et si les pays de l’Est y accèdent, ils entreront dans l’ère de la
postmodernité et pas du tout dans celle de la modernité. Même chose pour
l’économie libérale : les Droits de l’Homme. Des peuples entiers se
précipitent vers un objectif « historique » de liberté qui
n’existe plus du tout sous la forme dont ils rêvent, vers une forme de
représentation « démocratique » qui agonise elle aussi depuis
longtemps sous la spéculation, celle, statistique des sondages, celle, médiatique,
de l’information. L’illusion démocratique est universelle, liée au degré zéro
de l’énergie civile. De la liberté, il ne reste que l’illusion publicitaire,
c’est-à-dire le degré zéro de l’idée et c’est elle qui règle notre régime
libéral des Droits de l’Homme.
Jean Baudrillard : L’Illusion de la fin
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