Le bon Dieu sans confession

 

Taubes était indigne de confiance au plus haut point, tant sur le plan intellectuel que personnel. Il avait une façon bien à lui de s’attirer les faveurs des plus grands penseurs, puis de se les aliéner. Scholem n’était pas le seul à le mépriser. Leo Strauss et Hannah Arendt faisaient partie de la liste de ses contempteurs. Taubes était le genre d’homme à écrire sur son CV deux livres publiés alors qu’il n’avait même jamais envisagé de les écrire. Pourtant, certains le décrivaient comme « l’un des universitaires les plus éminents de sa génération » ou encore qu’il était « charmant, attachant, audacieux et réfléchi. » Il faut de tout pour faire un monde.

Taubes était, de l’avis général, un passionné de conversation. Il semblait connaître tout et tout le monde : du moins, il en donnait l’impression. Comme l’a dit un collègue universitaire : « Avant Google, il y avait Taubes. » On voudrait pouvoir se concentrer sur ses idées, sur ses découvertes inédites dans des voies pourtant déjà connues, et abandonner tout ce catalogue de défauts personnels, mais avec lui, c’est impossible : à mesure qu’on s’enfonce dans sa biographie, son amour pour l’antinomisme ressemble de plus en plus à une excuse pour ses pires tendances.

Mitchell Abidor : Les nombreuses vies de Jacob Taubes

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