Source : Leçons sur la Phénoménologie de l’esprit de Hegel par Jean-François Marquet, éditions Ellipses, collection L’Université philosophique, les cours de philosophie, dirigée par Jean-Pierre Zarrader.
Le coup de génie de Hegel va être de reconnaître que
l’identité du sujet et de l’objet ne se trouve pas seulement dans l’œuvre d’art
et dans le vivant, mais qu’elle se trouve d’abord et avant tout dans le
langage. C’est le langage qui apparaît, chez Hegel, comme le lieu propre où
sujet et objet s’identifient, s’égalisent, et d’une certaine façon, passent
l’un dans l’autre.
En effet, qu’est-ce que parler ? C’est d’une part,
pour un sujet, intérioriser, s’objectiver d’une certaine façon. Mais le
langage, en même temps qu’il est extériorisation du sujet, est intériorisation
de l’objet : la chose dont je parle cesse d’être une réalité matérielle
inexorablement située en tel ou tel point de l’espace et du temps ; elle
se trouve élevée à son essence. Donc, parler, c’est objectiver le sujet et
subjectiviser l’objet ; c’est là que sujet et objet échangent leurs
déterminations.
Et c’est pourquoi une philosophie qui ne veut pas être
une simple philosophie de l’objet ou de la Nature, ni une simple philosophie du
sujet, de l’Esprit ou de l’Histoire, mais une philosophie qui se veut
philosophie de l’identité, une telle philosophie doit être une philosophie du
langage, c’est-à-dire une logique ; étymologiquement, logos signifie avant
tout parole. « Au commencement était le Verbe », dit l’Évangile,
c’est-à-dire, au commencement était la parole.
Donc, la philosophie de l’identité, c’est-à-dire la
philosophie tout court, selon Hegel, c’est cette philosophie qui surgit quand
le langage parle de lui-même. Or, la logique, c’est du langage sur le langage,
c’est le langage parlant de lui-même et déployant son architecture, les
catégories fondamentales qui se retrouvent dans chacun de ses énoncés. C’est
pourquoi la logique va apparaître comme la philosophie absolue.
Dans la logique, le langage ne parle que de lui-même et c’est la raison pour laquelle la logique est, à proprement parler, le savoir absolu, ou plus exactement, le savoir de l’absolu par lui-même.
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