Après qu’il eut été
banni d’Amsterdam en 1656, sur l’initiative des rabbins, il mena une vie très
solitaire. On peut dire qu’avec Rembrandt (1606-1669) qui était son compatriote
et contemporain, Spinoza a été le premier grand homme moderne solitaire. Il
vivait seul dans la société, non pas en opposition à elle, une opposition qui
ne signifie pas un rapport révolutionnaire violent. Dire qu’il était dégoûté
serait un terme trop fort, parce que ce serait un affect. Il s’agit plutôt de
silence, d’aversion tacite, de solitude, d’hypersensibilité, bien entendu aussi
de malheur, de misère, et aussi, pour une grande partie, d’absence de joie.
Rembrandt supportait mal cet état d’âme pénible parce qu’il n’était pas
philosophe, tandis que Spinoza le supportait mieux puisque cela faisait presque
partie de sa propre philosophie. Il ne vivait pas de sa plume, mais du
polissage de verre ; il avait appris un métier, afin d’être indépendant,
afin de ne pas être contraint de vendre ses écrits.
Ernst Bloch : Quatre conférences sur Spinoza
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