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Source : Les Mots et les sons, un archipel sonore, par François J. Bonnet, préface de Peter Szendy éditions de l’Éclat, collection poche.

Pour Michel Chion, « on appelle objet sonore tout phénomène et événement sonore perçu comme un ensemble, comme un tout cohérent, et entendu dans une écoute réduite qui le vise pour lui-même, indépendamment de ses provenances ou de sa signification.

L’objet n’est pas donné. Il doit, à un moment ou un autre, apparaître et se présenter comme tel à la perception. Michel Chion comprend l’objet sonore comme un « tout cohérent » et il ne manque pas de s’interroger sur la manière dont cette cohérence se distingue et s’extrait d’un champ phénoménal, d’un champ sonore. Dans une métaphore toute alpestre, il montre que l’objet sonore peut n’être considéré que comme une saillance qui émerge d’un champ continu plus vaste.

« Les montagnes sont des objets bien spéciaux dont nous sommes conscients que ce n’est, après tout, que l’homme qui les isole en objets de leur ensemble géologique. Physiquement parlant, un pic de la chaîne du Mont-Blanc n’a pas d’existence et le fait de présenter un point culminant par rapport à son plus proche environnement ne signifie rien de spécial, en tout cas, ne fait pas une unité en soi, l’isolant du reste. Je voudrais simplement dire que les sons appartenant à un chaîne d’événement sonores ont parfois tendance à être de tels objets, qui ne sont ainsi que parce qu’ils se présentent sous une certaine face à la perception humaine. »

Si le son n’est pas objet en soi, le devenir-objet du son, son conditionnement en objet, dépend donc d’un processus spécifique, processus de ponction et de constitution de saillances sensibles et d’intégration à la logique objectale. Pour Pierre Schaeffer, la décomposition d’un champ sonore en élément discrets, en objets, est constitutive de l’écoute elle-même. Le devenir objet d’un son serait donc provoqué par une écoute toujours déjà discriminante, toujours lancée dans un processus d’identification. Ainsi s’articulerait une relation perceptive particulière entre le son, qui n’est pas objet en soi, et l’écoute qui se constituerait essentiellement comme affût de son à identifier et à ponctionner à partir d’un champ sonore ininterrompu.

Comment cette fonction s’opère-t-elle ? Comment l’objet, dans le sonore apparaît-il ? Selon Michel Chion, « le son n’est objet que dans certaines conditions. C’est un objet qui se constitue culturellement par un acte d’attention et de nomination. »

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