Heureusement, il y a Indus

 

Plus que tout autre, le courant industriel, à l’instar de Throbbing Gristle, a assumé l’adéquation entre une forme musicale limite et une critique sociopolitique. D’ailleurs, le logo d’Industrial Records, censé représenter une usine, s’est révélé être une photographie du bâtiment entourant les fours d’Auschwitz. Comme l’écrit Drew Daniel, la référence aux camps que font les membres de Throbbing Gristle à travers ce logo s’explique par le fait que le camp de concentration représente pour eux « un lieu historique de mémoire d’une guerre vieille de quarante ans, aussi bien que la vérité secrète de la vie de tous les jours : les camps ont montré que le modèle industriel peut être appliqué à tout, y compris à la vie et à la mort. » Mixant rythmes machiniques, synthétiseurs glaciaux, maelström lo-fi et paroles désabusées, la musique de Throbbing Gristle est l’expression même d’une sensibilité nihiliste cherchant à s’extraire du cynisme contemporain généralisé. Une telle subversion musicale cristallise une lutte idéologique entre défenseurs d’un ordre social ou d’un conservatisme culturel et promoteurs d’alternatives artistiques, politiques et sociales. La musique, dans son exposition à ses propres limites, devient un avant-poste de la contestation.

G.O. : We are here to have a good time
François J. Bonnet : Les Mots et les sons

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