Le développement des systèmes techniques a connu une
telle réussite que l’homme qui utilise des instruments aux effets démesurés
n’est plus capable de se représenter, ni d’éprouver, ni d’imaginer, même après
coup, les conséquences de ce qu’il a déclenché. Les décalages entre l’action et
la représentation, entre l’acte et le sentiment, entre la science et la
conscience, et enfin, surtout, entre l’instrument et le corps de l’homme, qui
n’est pas fait sur mesure pour le corps de l’instrument. Les différentes
facultés de l’homme ne sont plus à la hauteur de sa dimension technique.
Désormais, l’homme est plus petit que lui-même et sa tâche est de travailler à
une élongation de son imagination et de ses sentiments.
Günther Anders : Le Rêve des machines
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