« Il n’y aura plus de délai »

 

Source : Apocalypses et cosmologie du salut par Pierre Martin de Vivès, éditions du Cerf, collection Lectio Divina.

Le premier livre de l’apocalypse paraît de taille importante, scellé de manière à ne pouvoir être lu (Apocalypse 5, 1) Le second, au chapitre 10, est dit de petite taille et ouvert, ces deux éléments s’opposant point par point au premier livre du chapitre 5, ce qui confirme au besoin qu’il doit bien toujours s’agir du même ange dans les deux scènes.

Il n’est pas très difficile d’identifier le premier livre avec l’Ancien Testament lui-même, à savoir les Écritures dont le sens ne devient accessible que lorsque l’Agneau en a brisé les sceaux, c’est-à-dire lorsque le Christ en donne les clefs d’interprétation. Le petit livre est donné à manger au voyant, scène directement inspirée du livre d’Ézéchiel. L’identification de ce livre a suscité beaucoup d’hypothèses.

Il peut s’agir de l’Évangile lui-même, mais cela n’explique pas pourquoi l’auteur insiste sur l’aspect minuscule de l’ouvrage. Pour d’autres commentateurs, il s’agit simplement du livre de l’Apocalypse qui serait donné au voyant, mais l’emplacement de ce récit ne permet pas d’en faire un épisode inaugural. Enfin, ce petit opuscule peut n’être qu’un fragment de l’Apocalypse qui rompt le déroulement des sept trompettes et insiste sur l’élément prophétique persécuté dans la révélation.

Ce livre a pour objet d’être proclamé, au risque d’entraîner l’amertume suscitée par sa manducation. L’ange est donc ici le vecteur d’une révélation de type prophétique dans le modèle du récit de la vocation d’Ézéchiel. Mais le texte est compliqué par la présence de sept tonnerres qui semblent répondre au rugissement de l’ange lié à la présentation du petit livre. Alors que le livre est ouvert et doit être proclamé, le message des sept trompettes doit être scellé, comme le premier livre, et même la mise par écrit en est interdite au voyant.

Cette voix du tonnerre peut correspondre à la voix même de Dieu ou à une manifestation de son Esprit décrit comme septuple dans la vision inaugurale. Il s’agit de toute évidence d’une manifestation divine qui n’a pas à être relevée pour l’instant et que le voyant ne perçoit que par inadvertance. Mais le fait que ce grondement de tonnerre se manifeste en réponse au rugissement de l’ange indique encore une grande proximité de ce dernier avec la gloire divine. Le récit débouche sur une prestation de serment de cet ange, probablement inspirée de Daniel 12, 7

« Il n’y aura plus de délai. Mais où jour où l’on entendra le septième Ange, quand il sonnera de la trompette, alors sera consommé le mystère de Dieu, selon la bonne nouvelle qu’il en adonnée à ses serviteurs les prophètes. »

La mission de cet ange est liée à la révélation mais il n’est pas un révélateur. Il est au service de cette révélation et son rôle consiste à la mettre en valeur et à l’attester. Dans sa première intervention, ce n’est pas lui qui donne l’interprétation du livre scellé. Il se contente de le souligner, par sa question, que seul le Christ peut en donner la clef. Dans sa seconde intervention, ce n’est pas lui qui proclame le contenu du petit livre, mais c’est lui qui le remet au voyant/prophète et c’est lui qui atteste par un serment solennel l’accomplissement de tout ce qui est prévu. Pour que cet ange puisse être garant de l’origine divine de ces prophéties, qu’elles soient vétérotestamentaires ou néotestamentaires, il faut qu’ils reflètent tout particulièrement la gloire divine, d’où la description détaillée de l’ange et son qualificatif puissant.

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