L'Esprit glaire

 

À l’époque des médias électroniques, il n’existe plus d’endroit où l’on pourrait ne pas être informé ou plutôt désinformé, ou encore, pour être plus précis, plus d’endroit où l’on pourrait échapper à la contrainte d’être informé ou plutôt désinformé, puisqu’il n’existe plus aucune province, il n’existe donc plus d’endroit où l’on n’a pas les oreilles saturées des bavardages sur la « perte du sens » des philosophes ordinaires, des psychanalystes, des prêcheurs des ondes, ou encore des « cassettes automatiques de consolation » à écouter par téléphone.

Absurdité du concept du sens : j’y tiens d’autant plus que, parmi les actuels prédicateurs du sens, il n’y en a guère qui se contentent de dénoncer la perte du sens. Ils vendent sur-le-champ des remèdes, et plus leur étiologie est sommaire, plus leur conseils arrivent rapidement… Ces consolateurs et édificateurs bavards nous atteignent par l’intermédiaire de la radio, puisqu’ils peuvent y parler de la perte du sens comme d’une maladie, ils ne veulent pas, ils ne peuvent donc pas en arracher les racines et sont donc alors de purs charlatans.

Günther Anders : L’Obsolescence de l’homme


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