Affouragement

 

Alors qu’auparavant, en des temps plus naïfs, on avait rendu attrayantes des stories en s’assurant qu’elles étaient true to life, on fabrique désormais vraiment, car il faut bien qu’il y ait un progrès, la true life, les cris non joués, les larmes authentiques, l’impuissance effective avec que cette réalité arrangée devienne une story et qu’elle soit offerte et consommée en tant que telle, c’est-à-dire à l’état de fantômes. Bref, on a transformé le spectateur en un cannibale de fantômes qui dévore les images de ses prochains attirés dans le piège de l’appareil de prise de vue et il devient nerveux, il se sent floué s’il arrive pour telle ou telle raison qu’à l’heure de l’affouragement le repas se fasse attendre ou même n’ait pas lieu.

Günther Anders : L’Obsolescence de l’homme


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